
ISBN : 9782296110878
LA CRISE DE RAMADAN 1379 H. (FÉVRIER 1960) EN TUNISIE OU LES RISQUES ET PÉRILS DE LA DIFFUSION AUTORITAIRE DE LA RÉFORME
Le mois de ramadan, "la plus grande manifestation collective de la foi en
terre d'islam" 1, a occupé, depuis l'émergence du réformisme au XIXe siècle,
une place importante dans la politique religieuse des États, soucieux d'affirmer
leur pouvoir durant ce moment de ferveur communautaire 2. L'intervention du
président tunisien Habib Bourguiba sur ce sujet, quelques semaines avant le
début de ramadan 1379 H., s'inscrit dans cette pratique réformiste propre au
monde musulman. Elle s'en distingue cependant par son caractère audacieux.
Le "combattant suprême" (al-mujâhid akbar) affirme, en effet, se situer à
l'intérieur de l'islam puisqu'il conçoit sa réforme comme le résultat d'une
lecture nouvelle, moderniste et libérale, mais canoniquement fondée des
obligations coraniques en matière de jeûne du Ramadan. Annoncée dans un
discours prononcé au Palmarium de Tunis, le 6 février 1960, cette interprétation
personnelle est à l'origine d'une crise sans précédent entre le pouvoir
politique et les autorités religieuses.
Si l'islam a donné au jeûne du mois de ramadan valeur d'obligation
canonique et l'a compté parmi les cinq piliers de la foi, il a cependant prévu des
exceptions pour