LA PRÉCARITÉ ALIMENTAIRE ET L'AIDE INTERNATIONALE AU CONGO-BRAZZAVILLE
Jean-Félix Yekoka
De manière générale, le Congo-Brazzaville bénéficie des faveurs incontestables des
conditions climatiques en vue d'une production agricole capable de couvrir tout le
pays. De ce point de vue, parler de l'aide alimentaire mondiale pour le Congo peut
paraître d'emblée, pour un paysan habitué à la terre, une oeuvre injurieuse. Pour les
citadins exercés plus ou moins aux discours, dans les arcanes politiques
d'aujourd'hui, cela intègre incontestablement la matrice subversive jamais divorcée
avec les messes politiques d'hier. Car, au lendemain des indépendances, les
premiers gouvernements avaient pris en vain l'option maximale d'intégrer le
Congo et son économie dans une modernité compétitive au niveau de l'Afrique
centrale. C'est une recherche permanente et rassurée, semble-t-il, qui aurait donné
au Congo, grâce à un ensemble de stratégies, une figure tutélaire, et fait de lui un
"géant" économique de la sous-région. C'est dans cette perspective que
l'agriculture et l'industrie primaire furent prioritairement signalées.
Cette démarche fut vantée voire instrumentalisée par différentes idéologies
politiques qui ont successivement traversé le Congo et son appareil étatique. De
proche en proche, les questions de "suffisance" alimentaire furent intégrées dans
les manifestes agricoles. Et la société civile croyait défier enfin les turpitudes et
tribulations causées par la faim et la pauvreté, puisque, au début des années 1980,
la question alimentaire devenait véhémente et constituait le thème majeur d'une
doctrine officielle qui concevait la modernisation de l'agriculture comme le moyen
incontestable d'atteindre une alimentation capable de satisfaire toutes les bouches
(Yekoka 2005:26). La vision politique en la matière ne rétrograda pas. Au
contraire, avec la flambée des recettes générées par les deux "mamelles" de
l'économie congolaise (le pétrole et le bois), les projets agricoles et industriels
furent dorénavant l'objet d'une arithmétique dans le continuum prévisionnel, et
dans la dialectique consistant à juxtaposer les pensées de base dans les différents
Programmes d'ajustement structurel (PAS) des années 1980.
En effet, les politiques macroéconomiques des débuts de la décennie évoquée cidessus
scandaient médiatiquement : "Agriculture comme base, industrie comme
facteur du