MAIN DE VÉRITÉ
Raymond Bellour
La collection suppose une folie que la folie de filmer
accomplit en voulant l'épuiser. Elle en dresse un catalogue,
qui n'est plus celui de la chose ni celui de la liste, car le film
en construit une mémoire. Mais une mémoire sans code, une
mémoire d'expérience. Et c'est cette mémoire formée d'oublis
accumulés qui s'offre à l'épreuve de corps tendus vers elle,
juste dans un regard. D'où la tentation, une fois, de l'accompagner
de la main pour dire à ce regard : tu vois ce que je
touche et que je te montre, pour témoigner d'un supplément
de vérité. Ma main fait ce que la tienne pourrait faire si tu
redécouvrais ta collection la plus ancienne